Programme de soutien à la recherche « Autonomie » de la CNSA : les lauréats 2022

Publié le : 19 janvier 2023-Mis à jour le : 19 janvier 2023

Dans le cadre du Programme de recherche « Autonomie : personnes âgées et personnes en situation de handicap » 2022 conduit en partenariat avec l’Institut pour la recherche en santé publique (IReSP), la CNSA soutient 15 nouveaux projets en sciences humaines et sociales et en santé publique pour plus de 2 millions d’euros. Ces recherches portent l’analyse sur le virage domiciliaire, l’enjeu du chez-soi en EHPAD, les outils d’évaluation médico-sociale, la prévention, la place des proches aidants et l’inclusion des jeunes adultes en situation de handicap

Le programme de recherche autonomie en bref

En 2022, la CNSA et l’IReSP ont lancé quatre appels à projets (AAP) dans le cadre du programme « Autonomie » :

  • L’appel à projets générique dit « Blanc » (pour la 12e année consécutive) ;
  • Un appel à projets thématique qui s’intitule « Établissements, services et transformation de l’offre médico-sociale » (pour la 3e année) ;
  • Un appel à projets thématique « Autisme et sciences humaines et sociales » (pour la 2de année) ;
  • Un appel à projets qui vise le « Soutien à la structuration de communauté mixte de recherche » (pour la 2de année).

Les recherches financées en 2022 relèvent de six thématiques.

Instruire les conditions du virage domiciliaire

Le choix de vivre à domicile, par opposition à l’institution, est largement plébiscité par les personnes concernées et leurs proches. Toutefois, le virage domiciliaire présente des défis qu’il convient d’éclairer par la recherche. Trois recherches, financées dans le cadre de l’appel à projets « Établissements, services et transformation de l’offre médico-sociale », portent sur ces enjeux.

L’un de ces défis est relatif à la continuité de l’accompagnement – notamment la nuit. Le projet de recherche porté par Adrien Besseiche (chef de projets clinique au Gérontôpole d’Ile-de-France) propose d’évaluer des solutions d’accompagnement de nuit pour les personnes en perte d’autonomie et leurs aidants à domicile. Ce projet explore trois questions :

  • les aides de nuit sont-elles connues, attendues et acceptées au domicile par les binômes aidants-aidés ?
  • concourent-elles efficacement au maintien à domicile et soulagent-elles les aidants ?
  • et s’intègrent-elles à la pratique professionnelle et à la prise en charge globale à domicile ?

À ces fins, le projet vise à cartographier et à décrire les solutions d’aide de nuit à domicile (pertinence, recours, acceptabilité etc.), qu’elles soient existantes ou émergentes, puis à évaluer – sans les comparer – une sélection de ces solutions pendant deux ans.

Un autre de ces défis est l’attractivité des métiers du soin et de l’accompagnement à domicile des personnes en situation de handicap et en perte d’autonomie. Un premier projet mené par Audrey Rain (économiste à l’Institut des politiques publiques - IPP) s’intéresse au modèle des équipes autonomes (aussi appelé Buurtzorg) qui apparaît comme une option prometteuse pour permettre aux salariés de se réapproprier leur travail en limitant l’insatisfaction au travail et la rotation de la main-d'œuvre. Toutefois, ce nouveau modèle demande aux aides à domicile de nouvelles compétences en gestion des plannings et des plans de soin et un investissement au travail élevé. La recherche vise à évaluer les effets de cette nouvelle organisation du travail dite en “équipes autonomes” sur le personnel (absentéisme, turnover, risques psychosociaux, satisfaction au travail), ainsi que sur les personnes accompagnées (hospitalisations, décès, consommation de médicaments, passage en EHPAD).

Un second projet coordonné par Léa Toulemon (également économiste à l’IPP) vise à évaluer l’impact de la hausse des salaires dans le secteur de l’aide à domicile sur l’attractivité des métiers (les rémunérations des aides à domicile ont été revalorisées de  13 à 15% en 2021 dans le secteur privé non lucratif), notamment en considérant le recrutement des salariés, leur maintien dans l’emploi et leur satisfaction vis-à-vis de leur travail, ainsi que l’impact sur les structures d’aides concernées.

Résider ou habiter : l’enjeu du chez-soi en EHPAD

Comme déjà observé, le processus d’individualisation a pénétré le secteur de l’hébergement institutionnel en proposant des services de plus en plus individualisés aux personnes accueillies.
Le projet de Frédéric Balard (maitre de conférences en sociologie à l’Université de Lorraine)  s’inscrit dans cette dynamique d’individualisation encourageant les personnes à se sentir « chez elles » en institution. Pour comprendre l’appropriation de l’institution comme un domicile, le projet intitulé « De l’EHPAD à l’EHPAD » a pour objectif d’analyser ce que produit le déménagement de tous les résidents et des professionnels qui y travaillaient d’un EHPAD vers un autre EHPAD.

Les outils d’évaluation médico-sociale comme objet de recherche

Dans la continuité de travaux effectués par la CNSA, Philippe Le Moigne (chargé de recherche INSERM en sociologie) entend s’intéresser aux outils d’évaluation de l’autonomie et à leurs usages auprès des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Pour cela, dans un premier temps la recherche recensera différents outils d’évaluation (AGGIR, GEVA, DESIR, MAP, EGS, SMAF, VQS, etc.) et soumettra leur contenu à une analyse de type lexicographique, afin de dégager leurs définitions de l’autonomie. Dans un second temps, la recherche analysera l’usage des outils via l’étude d’une trentaine de situations d’évaluation à travers des observations et des entretiens avec des professionnels. Le projet vise également à intégrer l’usager et ses proches afin d’établir la manière par laquelle ils entendent contribuer à leur évaluation.

La prévention pour tous : théorie et pratiques

La quatrième thématique porte sur les préventions – primaire, secondaire et tertiaire – de la perte d’autonomie liée à l’âge et aux situations de handicap.
Karine Peres (chargée de recherche INSERM en épidémiologie) propose de mieux identifier les personnes âgées qui sont les plus à risque de « déclin fonctionnel », à mieux comprendre les mécanismes impliqués et à identifier les déterminants sur lesquels agir en priorité. L’objectif est d’évaluer et décrire la « vulnérabilité sociale » dans la population générale âgée et d’étudier les relations avec la perte d’autonomie au moyen de multiples approches méthodologiques complémentaires.

Yves Morales (maitre de conférences en STAPS à Toulouse) propose un projet d’amorçage dont le but est d’analyser l’intégration des activités physiques adaptées dans les établissements et services pour personnes âgées « fragiles » à des fins de prévention-santé et/ou de thérapeutiques non médicamenteuses, dans la perspective de réduire la perte d’autonomie. Via une démarche interventionnelle, il s’agit de mieux comprendre les formes de mobilisations des acteurs à l’origine des programmes d’activités physiques adaptées et d’identifier les facteurs pouvant les favoriser.

Le projet de recherche participative coordonné par Marc Le Fort (médecin spécialisé en médecine physique et de réadaptation au CHU de Nantes) veut questionner les modalités et le contenu d’un accompagnement des personnes lésées médullaires (LME) au-delà de la phase initiale. Il s’agit, si les personnes concernées se révèlent intéressées par un programme d’éducation thérapeutique spécifique, de participer à définir et formaliser plus globalement l’éducation thérapeutique continue et de déterminer le medium ou les media les plus adaptés ainsi que les thématiques à proposer et les modalités de mise à disposition vers les personnes avec une LME.

Julie Haesbaert (médecin spécialiste en santé publique à Lyon) encadre un projet d’évaluation de l’efficacité d’un nouveau programme médico-social d’accompagnement global des personnes en post-AVC et de leurs aidants (programme AVanCer). La recherche a pour objectif d’une part, l’amélioration des capacités d’autonomie et d’adaptation des patients ; et d’autre part, le soulagement du poids social et psychoaffectif des aidants. Cet accueil de jour expérimental, complémentaire des soins de rééducation fonctionnelle et de prévention de récidive, propose aux adultes présentant des séquelles post-AVC et à leurs aidants suite au retour à domicile, des programmes d’éducation thérapeutique, d’activité physique adaptée, de remédiation sociale et cognitive et des ateliers thérapeutiques, ainsi qu’un lieu d’échange, d’information et d’écoute pour les personnes concernées et leurs aidants.

Enfin, la création d’une Communauté mixte de recherche (CMR) coordonnée par Matthieu de Stampa (médecin de santé publique et gériatre à Marseille) vise à développer un réseau entre les chercheurs, les professionnels de la prévention et en gérontologie et en associant les personnes âgées en perte d’autonomie. L’objectif des membres de la CMR sera de travailler à l’élaboration de projets de recherche participatifs portant sur la mise en œuvre d’interventions dites non médicamenteuses de prévention de la perte d’autonomie chez les personnes âgées (comme des activités physiques, des pratiques psychocorporelles, du soutien social, des conseils diététiques, de la zoothérapie, etc.).

Quelle place pour les proches ?

La place des proches dans l’accompagnement des personnes en situation de handicap est un thème de recherche soutenu depuis de nombreuses années.
D’un côté, la recherche coordonnée par Nicolas Henckes (sociologue au CNRS) vise à faire une sociologie du dépistage précoce et des anticipations dans les troubles du spectre autistique (TSA). Il s’agit de comprendre à la fois les façons dont les savoirs et les représentations sur le risque d’autisme circulent entre chercheurs, cliniciens, soignants et familles, les parcours de vie et de soins de ces dernières et les anticipations qu’elles développent pour leur enfant et elles-mêmes.

De l’autre, Karine Baumstarck (médecin de santé publique à Marseille) – après avoir obtenu un financement en 2021 pour développer une Communauté mixte de recherche sur la question des polyhandicaps – propose un projet de recherche participatif et mobilisant des méthodes mixtes (quantitatif et qualitatif) sur les vécus, besoins et attentes des familles (les parents et la fratrie) de personnes polyhandicapées vieillissantes.

Inclusion des jeunes adultes en situation de handicap.

Le dernier axe identifié parmi les projets soutenus porte sur l’inclusion des personnes en situation de handicap, et en particulier des jeunes.
Pierre Verger (médecin épidémiologiste et directeur de l’Observatoire régional de la santé Provence-Alpes-Côte d’Azur) porte un projet d’amorçage dont le but est de mieux identifier et quantifier l’impact de différentes situations de handicap sur le déroulement et la réussite du cursus universitaire des étudiants en situation de handicap, et de mieux comprendre les difficultés auxquelles ils sont confrontés, les limites des dispositifs d’accompagnement existants, mais aussi les facteurs qui seraient facilitateurs, de sorte à formuler des recommandations auprès des instances universitaires pour améliorer leur situation et leur accompagnement.

L’objectif du projet de Rémi Richard (maitre de conférences en sociologie en STAPS à Montpellier) est non seulement de comprendre les raisons pour lesquelles les adolescents et les jeunes adultes de 16 à 25 ans ayant un TSA accèdent ou non à l’activité physique, mais aussi pourquoi certains d’entre eux arrêtent la pratique sportive lors du passage à l’âge adulte. Pour cela, les chercheurs souhaitent reconstituer les différentes trajectoires sportives de ces jeunes en les réinscrivant dans le contexte plus large de leurs parcours scolaires et professionnels réalisés au sein ou à l’écart des institutions médico-sociales. Plus précisément, il s’agit d’observer l’impact que peuvent avoir les recompositions de leur trajectoire institutionnelle et sociale – qui surviennent au moment de leur passage à l’âge adulte - sur leur pratique sportive.

Enfin, Delphine Moreau (professeure de sociologie à l’EHESP) entend constituer, structurer et animer une Communauté mixte de recherche en Bretagne favorisant le développement de recherches participatives sur les enjeux liés à la santé mentale et au handicap psychique.

En savoir plus sur les appels à projets 2023

Les appels à projets 2023 seront ouverts le 3 février 2023. Vous souhaitez en savoir plus ? Participez au webinaire d’information, le jeudi 9 février 2023 de 14h à 15h30. La CNSA et l’IReSP y présenteront les différents textes et modalités du programme Autonomie et répondront à vos questions. Inscrivez-vous au webinaire !

Liste des 15 projets lauréats en 2022

Appel à projets « Établissements, services et transformation de l’offre médico-sociale »

  • Frédéric BALARD, De l’EHPAD à l’EHPAD : étude de cas d’un déménagement d’EHPAD sur l’appropriation des lieux par les résidents et les professionnels  
  • Adrien BESSEICHE, Évaluation de solutions d’accompagnement de nuit pour les séniors en perte d’autonomie et leurs aidants à domicile : bénéfices et limites (SNOSE)
  • Julie HAESEBAERT, Évaluation de l’implémentation d’un nouveau programme médico-social d’accompagnement à l’autonomie des personnes en post-AVC et de leurs aidants (Eval-ARRPAC) – Santé publique
  • Philippe LE MOIGNE, L’Évaluation de l’autonomie. Des outils aux usages (EVAUTO)
  • Audrey RAIN, Effets d’une nouvelle organisation du travail dans l’aide à domicile : une évaluation par tirage aléatoire (EvalOrgaSad)
  • Léa TOULEMON, Hausse des salaires des aides à domicile :  quels effets sur le secteur ? (AideDom)  

Appel à projets « Blanc »

  • Karine BAUMSTARCK, Vécus, besoins et attentes des familles de personnes polyhandicapées vieillissantes (PolyAGE)
  • Marc LE FORT, Accompagnement à l’Appropriation, l’aUtoGestion et l’édUcation théRapeutique continuE concernant la prévention secondaire du Lesé Médullaire (AUGURE-LME)
  • Yves MORALES, Coordinations pour l’Activité physique – adaptée à la prévention de la perte d’autonomie (CAP-APPA)  
  • Karine PERES, Vulnérabilité sociale et perte de l’autonomie du sujet âgé : approche descriptive et analytique des mécanismes impliqués (Vol PERLA)
  • Pierre VERGER,    Impact sur le cursus universitaire des étudiants des situations de handicap et des dispositifs d’accompagnement : faisabilité d’une étude de cohorte (Handi-Etud)

Appel à projets « Autisme et sciences humaines et sociales »

  • Nicolas HENCKES, Familles face au risque d’autisme. Une sociologie du dépistage précoce et des anticipations dans les troubles du spectre autistique      
  • Rémi RICHARD,    Identifier les freins et les leviers sociaux à la participation sportive des personnes ayant un trouble du spectre de l’autisme lors du passage à l’âge adulte (AutiSport)

Appel à projets « Soutien à la structuration de communautés mixtes de recherche »

  • Matthieu de STAMPA, Communauté mixte de recherche INNOVIDEP (INterventions NOn médicamenteuses pour VIvre mieux avec la DEPendance) Communauté mixte de recherche sur les services de santé et les politiques publiques entre chercheurs et professionnels de la prévention et en gérontologie (INNOVIDEP)
  • Delphine MOREAU, Communauté mixte de recherche « santé mentale-handicap psychique »

 

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