Analyse sociologique des habitudes de vie des adultes atteints de maladies neuromusculaires

Publié le : 01 septembre 2016-Mis à jour le : 21 juin 2018

La maladie de Steinert a été décrite en 1909 par Hans Steinert, médecin hospitalier allemand, mais l’anomalie génétique héréditaire responsable de cette maladie n’a été identifiée qu’en 1992. La particularité de cette maladie neuromusculaire, chronique, évolutive et génétique est de toucher à la fois le système neuromusculaire et un ensemble plus vaste d’organes ou de fonctions. Elle est la plus fréquente des maladies neuromusculaires rares.
La méthodologie retenue par les chercheurs pour ce projet est exclusivement qualitative. Il s’agit d’une approche inductive et compréhensive visant à rendre compte des effets de la maladie du point de vue des patients et interrogeant les rapports qu’ils entretiennent avec les soignants. Le rapport final présente les résultats en trois parties :

  • la première partie décrit comment on entre dans la maladie. Si le diagnostic est soudain, c’est par étapes et au cours d’un processus long que les patients « deviennent » malades. L’analyse génétique n’est qu’une étape qui parfois ne change pas radicalement le cours des choses, mais conduit les personnes atteintes à revisiter leur histoire. Désormais, elles « ont » la maladie. Cette annonce ne les « rend » pas malades pour autant, mais enclenche chez eux et chez leurs proches une recomposition des rôles et des places, y compris lorsqu’il s’agit de revisiter le passé. Mais « avoir » une maladie n’est pas « être malade », et ce n’est que progressivement que ces personnes vont « devenir » malades ;
  • au cours de ce processus, les personnes atteintes vont développer des compétences particulières pour tenter de conserver une autonomie corporelle, sociale, affective, mais aussi entamer une redistribution des rôles impliquant l’ensemble de leur environnement : professionnel, familial, relationnel. « Être » malade de Steinert représente un processus ontologique qui bouleverse l’ensemble des rôles sociaux en constante recherche d’un nouvel équilibre, pour soi, mais aussi pour l’ensemble de son entourage;
  • dans la dernière partie, les sociologues se penchent sur la maladie de Steinert, du point de vue des médecins et des soignants. Ils tentent de comprendre les logiques à partir desquelles la maladie est comprise et leur mise en pratique à travers l’organisation des consultations multidisciplinaires. On comprend qu’il n’est pas plus aisé ni plus spontané de « devenir » soignant de patients atteints de maladie de Steinert que, pour les personnes concernées, de « devenir » malades. Chacun « bricole » ainsi avec les objets de son propre travail pour tenter de l’adapter à une représentation opérationnelle de la maladie.

Cette double approche, via les patients et via les soignants, permet de comprendre ce qui se joue lors des consultations. À l’évidence, patients et soignants ne partent pas de la même place et souvent même pas de la même « maladie », et les points de rencontre peuvent devenir ouvertement problématiques.

N. B. Les résultats présentés ici sont ceux posés dans le rapport final (sept 2016).

Pour plus d’information sur ce projet

  • HARDY A.-C., LECORDIER D., PERROT A., et al. « La maladie de Steinert racontée par ceux qui la vivent… À propos de l’étude ASHAM », Les Cahiers de myologie, n° 15, 2017, p. 22-26.
  • LECORDIER D., CARTRON E., JOVIC L. « Comprendre les personnes atteintes de la maladie de Steinert pour mieux les soigner », Recherche en soins infirmiers, n° 131, 2017/12, pp : 13-28.

À propos de l’équipe

La recherche a été coordonnée par Anne-Chantal Hardy, directrice de recherche au laboratoire « Droit et changement social ». Ce laboratoire pluridisciplinaire analyse le rôle du phénomène juridique dans les transformations de la société contemporaine. Le droit est appréhendé comme un phénomène social de part en part : il est à la fois le produit de la société (de ses valeurs, de ses conflits) et un vecteur déterminant des transformations sociétales. Il accueille des chercheurs de différentes disciplines, droit, histoire, sociologie, sciences politiques dans une perspective interdisciplinaire et complémentaire.
L’équipe était aussi composée de deux ingénieurs d’études, doctorants en sociologie : Didier Lecordier, infirmier-cadre de santé et membre de l’Association de recherche en soins infirmiers (ARSI) et Adeline Perrot, aujourd’hui docteure en sociologie. Le projet a par ailleurs été habilité par la Maison des sciences de l’homme Ange-Guépin, qui a accueilli l’équipe et recruté les ingénieurs.
Enfin, l’étude a été suivie par un comité de pilotage avec lequel les chercheurs ont constamment échangé. Ce groupe était composé de médecins et d’infirmières du centre de référence des maladies neuromusculaires rares Nantes-Angers, de membres de la Fondation Maladies rares et de l’Association française contre les myopathies, et d’infirmières membres de l’ARSI.
www.dcs.univ-nantes.fr/ (nouvelle fenêtre)
www.msh.univ-nantes.fr/ (nouvelle fenêtre)

Contact

Anne-Chantal Hardy, sociologue, directrice de recherche du CNRS
Laboratoire droit et changement social
Université de Nantes
Courriel : anne-chantal.hardy@univ-nantes.fr

Référence du projet n° 182
Appel à projets 2012 – Maladies rares et SHS (Fondation Maladies rares)
Titre : Analyse sociologique des habitudes de vie des adultes atteints de Dystrophie myotonique de type 1 ou maladie de Steinert. (A.-C. Hardy)

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