Partager l’héritage avant, financer l’hébergement en institution

Publié le : 29 novembre 2010-Mis à jour le : 14 août 2019

Cette thèse traite des enjeux économiques de l’entrée en institution de personnes âgées aux revenus et au patrimoine modestes. Il s’agit, d’une part, de comprendre les décisions familiales à propos des enjeux financiers et patrimoniaux du séjour en institution du parent âgé et, d’autre part, d’interroger les enjeux d’affiliation qui parcourent ces décisions et l’héritage anticipé qu’elles impliquent la plupart du temps.

En premier lieu, l’enquête montre que les décisions concernant le patrimoine et les affaires personnelles du résident nouvellement entré en institution se déclinent en trois « moments » principaux. On observe tout d’abord des stratégies de « mise en attente » de l’ancien logement visant à différer autant que possible les marques de l’installation. La nécessité morale d’euphémiser l’approche de la mort et plus encore l’obligation concrète pour les enfants de se comporter en héritiers avant l’heure exacerbent alors les tensions ayant pu apparaître à d’autres moments de l’histoire des relations de parenté. Ensuite intervient la remise en usage du logement, qui se traduit dans le cas des propriétaires par le choix massif de la vente du bien. La vente est en partie contrainte par l’impératif de préservation de la valeur du patrimoine qu’implique la morale populaire de valorisation de l’effort d’accumulation, ainsi que par les besoins de liquidités pour financer les coûts d’hébergement de la personne âgée. Si les mobilités sociales et géographiques entraînent un moindre attachement affectif au bien immobilier, sa liquidation est cependant privilégiée dans l’optique de protéger les descendants d’une ponction directe sur leur budget au titre de l’obligation alimentaire. Enfin intervient l’organisation d’un partage des biens que la personne âgée ne peut emporter en institution, un héritage sans décès où est mis en œuvre un aménagement des règles du droit des successions, dans une optique de justice intrafamiliale privilégiant l’égalité entre descendants de même rang plutôt que l’équité. Malgré son absence systématique lors du partage, le fait que le résident soit en vie joue comme un régulateur des tensions entre enfants, sur lesquels pèse l’obligation de lui rendre des comptes.

L’étude met à jour une véritable économie familiale du financement de l’hébergement, dont les modalités sont négociées à la croisée des visions juridiques et indigènes des solidarités entre générations et de la justice entre parents de même rang. Ainsi, à l’heure d’une augmentation du nombre des personnes âgées ayant besoin d’aide pour assurer leur quotidien, ce travail questionne plus largement les conséquences familiales et patrimoniales des situations de dépendance.

Pour plus d’information sur ce projet

  • Cette thèse de doctorat, préparée sous la direction de Florence WEBER, a été soutenue en 2010 à l’École des hautes études en sciences sociales de Paris (centre Maurice Halbwachs – UMR 8097).
  • La réalisation de cette thèse a bénéficié de deux bourses doctorales, l’une de la Caisse nationale des allocations familiales, l’autre de la Fondation Médéric Alzheimer.

À propos du laboratoire

PACTE (politiques publiques, action politique, territoires – nouvelle fenêtre) – UMR 5194
PACTE, laboratoire des sciences sociales, est une unité mixte de recherche du CNRS, de l’université Grenoble Alpes et de Sciences Po Grenoble, implantée principalement sur le site universitaire Grenoble Alpes. Ses membres sont investis dans la construction de langages communs et de connaissances transverses sur les transformations de nos sociétés dans leurs dimensions politiques, territoriales, sociologiques et écologiques. Le laboratoire place l’interdisciplinarité au cœur de ses pratiques, par le partage et la confrontation des méthodes, des épistémologies et des terrains communs. PACTE rassemble la majorité des géographes, politistes, sociologues et urbanistes du site et accueille également des économistes et historiens.

Solène Billaud (nouvelle fenêtre) est maîtresse de conférences en sociologie à l’université Grenoble Alpes et responsable du parcours de master « Vieillissement, sociétés, technologies ». Elle travaille principalement sur la prise en charge, publique ou privée, du handicap et de la dépendance à différents âges de la vie et s’intéresse plus généralement aux liens entre questions de santé, action publique, relations de parenté et économie domestique.

Contact

Solène Billaud
Maîtresse de conférences
Département de sociologie, université Grenoble Alpes
Chercheuse au laboratoire PACTE (UMR 5194)
Courriel : Solene.Billaud@univ-grenoble-alpes.fr

Référence du projet n° 139
Appel à projets 2011 – Handicap et perte d’autonomie (IReSP)
Titre : Partager avant l’héritage, financer l’hébergement en institution. Enjeux économiques et mobilisations familiales autour de personnes âgées des classes populaires (S. Billaud).

 

Documents à télécharger

Fiche de résultat de recherche : Partager l’héritage avant, financer l’hébergement en institution (PDF, 203.66 Ko)
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