Drépanocytose : de la médecine pédiatrique à la médecine pour adulte

Publié le : 02 janvier 2018-Mis à jour le : 02 mars 2022

La drépanocytose est une maladie génétique qui se caractérise par une modification de la forme des globules rouges. Elle entraîne une anémie et des douleurs chroniques aiguës, de graves infections bactériennes et des nécroses. Cette maladie atteint surtout les populations originaires d’Afrique et de ses diasporas, de certaines régions méditerranéennes, du Moyen-Orient et d’Asie. En France, environ 400 nouveau-nés naissent chaque année avec un syndrome drépanocytaires clinique majeur. Grâce aux progrès de la médecine, l’espérance de vie de ces patients a beaucoup augmenté ces dernières années. La prise en charge de la drépanocytose nécessite donc désormais une prise en charge médicale de l’enfance à l’âge adulte, ce qui implique un passage de la médecine pédiatrique à la médecine pour adulte.
Les chercheurs, anthropologue et médecin, ont interviewé 11 jeunes femmes et 11 jeunes hommes de 18 ans à 26 ans et 8 de leurs parents. Ces entretiens ont eu lieu à domicile. Ils offraient un espace de parole et une écoute attentive, sans jugement. Pour les jeunes, c’était l’occasion de parler de leur maladie, mais aussi de leur vie quotidienne, de leurs amitiés, de leurs amours et de leurs projets professionnels. Certains ont dénoncé des maltraitances subies à l’hôpital pour adultes, d’autres ont exprimé toute leur reconnaissance à l’égard des infirmières et de leur médecin, que ce soit en pédiatrie ou chez les adultes.
Cette étude anthropologique a montré que le passage de la médecine pédiatrique à la médecine pour adulte est rude pour ces patients habitués à des professionnels qu’ils connaissent depuis longtemps et qui les ont vus grandir.
Le manque de connaissances qu’ils ont de leur propre maladie et de leur traitement est particulièrement avéré dans leurs représentations de la transmission de la maladie. Cela affecte leur santé, mais aussi leur vie affective. Ils développent eux-mêmes des représentations « racisées » de leur propre maladie. Pour toutes ces raisons, les chercheurs suggèrent qu’un point soit systématiquement fait sur la maladie avant le passage dans le secteur adulte. Il conviendrait de créer pour les jeunes qui en ressentent le besoin un rite de passage collectif conduit par des pairs déjà passés chez les adultes ainsi qu’un groupe de parole pour les parents qui ont vu leur enfant passer chez les adultes, également animé par des pairs.
Les chercheurs proposent également de poursuivre la formation du personnel des hôpitaux, qui ne réalise pas toujours la gravité de cette maladie. L’une de ses caractéristiques est l’intensité de la douleur. Elle est telle que les mots semblent parfois impuissants à l’exprimer. Dans ces conditions, l’absence de prise en charge de cette douleur est particulièrement choquante.
Enfin, à l’incertitude sur l’évolution de la maladie et sur l’irruption de crises douloureuses s’ajoute celle sur l’avenir social. L’insertion dans le monde du travail est particulièrement difficile comme le montrent les difficultés pour trouver un stage.

N. B. Les résultats présentés ici sont ceux posés dans le rapport final (2018, PDF, 1,34 Mo).

À propos du laboratoire

L’UMR-S 1123 « ECEVE » est une unité mixte de recherche localisée sur le site de la faculté de médecine de Villemin, université Paris 7. Elle réunit les disciplines de l’épidémiologie clinique, de l’économie de la santé, des biostatistiques et de la santé publique, mais aussi des disciplines médicales et paramédicales (pédiatrie, gériatrie, psychiatrie, pharmacie, psychologie et sciences infirmières) et des sciences humaines et sociales (anthropologie, sociologie).
L’UMR-S 1123 a pour objectif l’optimisation des pratiques et des parcours de soins des populations vulnérables par la production de connaissances pour l’aide à la décision médicale (amélioration des pratiques, production de recommandations ciblées) et l’aide à la décision publique (développement de changements organisationnels à travers des projets de recherche interventionnelle, élaboration de nouvelles politiques de santé).
 

Contact

Maria Teixeira, anthropologue
Université Paris Diderot – UMR 1123 ECEVE – INSERM
Courriel : maria.teixeira@univ-paris-diderot.fr

Référence du projet n° 184
Appel à projets 2013 – Sciences humaines et sociales & maladies rares (partenaire : Fondation Maladies rares)
Titre : Transition et insertion dans le monde adulte des jeunes atteints de drépanocytose (M. Teixeira).

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