SOMMAIRE
- La genèse du schéma
- Augmenter les compétences et les ressources collectives sur les handicaps rares
- Structurer territorialement les expertises et les accompagnements médico-sociaux
Ce qu’il faut savoir du handicap rare : 1 déficience + 1 déficience = handicap x 6
Le handicap rare combine trois types de rareté : rareté des publics + rareté des combinaisons de déficience + rareté et complexité des technicités.
L’article D. 312-194 du code de l’action sociale et des familles définit cumulativement le handicap rare par un taux de prévalence qui ne doit pas être supérieur à un cas pour 10 000 habitants et par l’une des combinaisons suivantes :
- l’association d’une déficience auditive et d’une déficience visuelle graves ;
- l’association d’une déficience visuelle grave et d’une ou plusieurs autres déficiences graves ;
- l’association d’une déficience auditive grave et d’une ou plusieurs autres déficiences graves ;
- une dysphasie grave associée ou non à une autre déficience ;
- l’association d’une ou plusieurs déficiences graves et d’une affection chronique, grave ou évolutive, telle qu’une affection mitochondriale, une affection du métabolisme, une affection évolutive du système nerveux ou une épilepsie sévère.
La genèse du schéma
Un enjeu à l’échelle nationale
Les enfants et adultes porteurs d’un handicap rare sont confrontés à des besoins complexes et spécifiques. Parce qu’ils sont présents en petit nombre sur les territoires d’intervention des politiques sociales et médico-sociales, les schémas départementaux ne s’adressent pas à eux en priorité et nécessitent que l’on dépasse l’aire départementale, voire régionale. Le schéma national pour les handicaps rares [1] (zip, 2.15 Mo) a donc pour vocation de développer la connaissance de ces populations, peu quantifiées à ce jour. Il détermine les priorités et les conditions d’évolution à cinq ans de l’offre de services sociaux et médico-sociaux pour cette population en nombre limité. Sa mise en œuvre s’appuie sur des projets d’information, de recherche, et de formation qui impliquent une mobilisation nationale, voire internationale.
Le schéma, fruit d’une concertation organisée par la CNSA
Le point de départ, pour l’élaboration de ce schéma, a systématiquement été le parcours de vie des personnes. Celui-ci a été envisagé à la fois à partir de l’expression des attentes des usagers et des familles et de l’expression du point de vue des professionnels. Les attentes se sont exprimées autour :
- de la poursuite de l’investissement sur la connaissance et la détection la plus précoce des handicaps rares ;
- des moyens de favoriser des comportements professionnels adaptés
- du développement des services de soutien, des relais et, dans certains cas, des lieux de vie.
Pour l’élaboration du schéma, la CNSA, sous l’égide de son Conseil scientifique, a procédé à une très large concertation (audition des associations de personnes et d’usagers, des gestionnaires d’établissements et de services, des centres de ressources, approche internationale du sujet...), qui a abouti à une construction permettant de ne pas partir de la seule vision des dispositifs existants. Les travaux se sont donc essentiellement déroulés selon deux axes :
- les parcours de vie des personnes ayant un handicap rare et leurs attentes en termes d’accès aux droits et aux services sanitaires et sociaux ;
- l’expression des professionnels généralistes et spécialistes intervenant dans ce champ.
Augmenter les compétences et les ressources collectives sur les handicaps rares
L’augmentation des ressources et des compétences collectives spécialisées repose sur la consolidation des centres de ressources existants, le développement de la recherche et l’information des professionnels. Ces ressources permettent d’améliorer le repérage des personnes en situation de handicap rare, de valoriser leurs capacités pour mieux les accompagner.
Consolider et développer les missions et la coopération des centres de ressources nationaux sur les handicaps rares existants
Le 13 mars 2012, Marie-Anne Montchamp a signé la convention d’objectifs et de moyens du Groupement national de coopération handicaps rares (GNCHR) [2] (pdf, 383.07 Ko) qui réunit les trois centres de ressources nationaux sur les handicaps rares de type sensoriel existants : le Centre Robert Laplane (Paris), le CRESAM (Saint-Benoît) et le Centre la Pépinière (Loos).
Le GNCHR a pour objectif d’optimiser et de coordonner le développement et la diffusion des savoirs et savoir-faire dans le domaine de l’accueil, de la prise en charge et de l’éducation de personnes souffrant de handicaps rares combinés (tels que la cécité et la surdité).
Le groupement a notamment contribué à la réflexion menée par le Conseil d’orientation scientifique sur les handicaps rares (COS) sur les spécificités du handicap rare dans la formation des professionnels. Il a participé aux concertations pour la création de deux nouveaux centres de ressources (troubles du comportement sévères, épilepsie sévère) et a engagé un travail visant à l’harmonisation des sites internet des centres ressources.
Développer la recherche et capitaliser les savoirs
Le schéma vise à la fois le soutien à la recherche et la formalisation des savoirs. Ces objectifs suivent l’évolution des missions des centres nationaux de ressources pour les handicaps rares et sont en lien avec les plans nationaux existants (plan national Maladies rares, plan Autisme).
Les actions engagées ont largement dépassé ce que prévoyait le schéma, sous l’impulsion du Conseil d’orientation scientifique sur les handicaps rares et de la direction scientifique de la CNSA, soutenus par la mission recherche de la DREES. La CNSA a financé deux appels à recherche, lancés sous la responsabilité scientifique de l’IRESP en 2011 et 2012. Six projets ont été sélectionnés et sont soutenus pour un montant total de 812 579 euros.
Depuis 2010, l’Inserm épaule les centres nationaux de ressources sur la méthodologie à suivre pour formaliser leurs savoirs et savoir-faire acquis ces dix dernières années. Cinq référentiels, par handicap, sont en cours : hypotonie et cécité, surdicécité primaire, surdicécité secondaire ou acquise, surdicécité tertiaire (liée au vieillissement), surdité et déficience vestibulaire. Ils seront complétés de référentiels transversaux : diagnostic, communication, déplacements, etc. L’ensemble de ces travaux est piloté par le Groupement national de coopération handicaps rares.
Entre août et décembre 2011, le cabinet ALCIMED, mandaté par la CNSA, a conduit une étude sur les troubles du comportement sévères [3] (pdf, 627.61 Ko). Il a auditionné des professionnels de la psychiatrie, de la neurologie et du secteur médico-social pour déterminer les besoins des personnes.
L’analyse s’est appuyée sur leur expérience dans trois situations concrètes :
- des personnes atteintes d’autisme, d’une déficience sensorielle associée, d’une déficience intellectuelle et de troubles du comportement sévères ;
- des personnes atteintes d’une pathologie d’ordre psychiatrique (schizophrénie, psychose, etc.), d’une déficience motrice associée et de troubles du comportement sévères ;
- des personnes atteintes d’une affection neurologique évolutive rare (Huntington par exemple) associant notamment des déficiences cognitives, motrices et présentant des troubles du comportement sévères.
L’information du public et la formation des professionnels
Entre octobre 2011 et février 2012, l’organisme CRP consulting a réalisé deux enquêtes auprès de professionnels des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), des centres de référence des maladies rares, d’établissements et services médico-sociaux et de représentants d’associations pour évaluer leur connaissance et leur perception sur le handicap rare et le schéma.
La première, quantitative, révèle que les cent soixante-dix acteurs interrogés n’ont qu’une connaissance partielle de ce que recouvre le handicap rare (rareté des publics) ou qu’ils n’identifient pas les situations de handicap rare comme telles. Mais cette posture change dès lors qu’ils ont connaissance du schéma. En effet, dans ce cas, 60 % d’entre eux déclarent mieux repérer les situations.
Les trente acteurs interrogés lors de la phase qualitative ont adopté trois postures vis-à-vis du schéma : du scepticisme, de la curiosité ou un intérêt prononcé (professionnels avertis). Ces entretiens approfondis démontrent la nécessité du travail en réseau, d’échanger sur les pratiques, de développer les outils d’information.
Pour répondre à ces besoins, un séminaire sur les problématiques de communication dans les situations de handicap rare et/ou complexe a été organisé fin 2012 à destination des professionnels du secteur.
Les travaux conduits par Orphanet
L’une des missions confiées à Orphanet, dans le cadre d’une convention liant la CNSA et l’Inserm, est de compléter les articles d’information grand public existants sur les maladies rares. Ces textes sont actuellement disponibles sur le site internet d’Orphanet. Ils précisent, pour les maladies rares visées :
- quelles situations de handicap découlent des manifestations de la maladie ;
- quelles sont les aides à mettre en œuvre pour limiter et prévenir le handicap ;
- comment vivre avec la maladie : famille, scolarité, communication, vie professionnelle, handicap dans la maladie au quotidien.
En complément, des textes décrivant spécifiquement les handicaps associés aux maladies rares sont produits. Ils sont à destination notamment des professionnels du handicap. Ces textes sont désormais en ligne (ils sont accessibles via l’onglet "Focus Handicap [4]" sur la page d’Orphanet consacrée à la maladie) :
L’autre chantier, qui consiste à indexer les maladies rares avec les termes de la classification internationale du fonctionnement du handicap et de la santé (CIF) afin de faciliter l’identification des conséquences handicapantes de ces maladies par les professionnels médico-sociaux, est également en cours.
Communiquer avec les personnes en situation de handicap rare
Le sujet de la communication avec les personnes en situation de handicap rare est paru comme saillant et commun à toutes les situations complexes, que ce soit sur le versant réceptif ou expressif. Le groupement national de coopération a donc organisé fin 2012 un colloque au cours duquel professionnels et chercheurs ont échangé sur les stratégies d’entrée en relation avec ces personnes et partagé les outils de communication qu’ils ont imaginés pour compenser les handicaps. Consultez les actes (pdf, 891.19 Ko). [5]
La pédagogie du doute
Tout au long de la durée du schéma, la CNSA et le groupement national ont communiqué pour rendre les professionnels vigilants face à ces situations peu fréquentes.
La formation des professionnels
Le schéma prévoit de former les professionnels de l’accompagnement social et médico-social qui interviennent en établissement et à domicile. Là encore, l’expérience des centres nationaux de ressources doit être capitalisée et structurée dans un cadre de formation national, sous le pilotage du groupement national de coopération. L’objectif est de poursuivre et d’accentuer la formation continue des professionnels.
Développer la connaissance des besoins des personnes en situation de handicap rare
Alors que les résultats des travaux de recherche lancés en 2011 sont publiés, de nouveaux sont lancés. Ils devraient éclairer les décideurs et les professionnels sur les besoins des personnes et les compétences disponibles pour y répondre.
Publication d’une expertise collective de l’Inserm
L’Inserm a publié les résultats d’une expertise collective sur le sujet des handicaps rares [6] (pdf, 1.88 Mo). Réalisée à partir de la synthèse et de l’analyse critique de la littérature grise, scientifique, nationale et internationale sur le handicap rare, elle doit éclairer les pouvoirs publics dans leurs prises de décisions. L’exercice s’est avéré plus complexe qu’à l’habitude pour les onze experts concernés, puisque le terme « handicap rare » n’existe pas dans la littérature étrangère.
Une enquête sur le parcours des enfants en situation de handicap rare
La CNSA subventionne les registres1 du handicap de l’enfant de l’Isère et de la Haute-Garonne dans l’objectif de réaliser une enquête qualitative sur le parcours d’enfants en situation de handicap rare. Les résultats devront permettre de connaitre les attentes des parents et des professionnels, déterminer si les réponses proposées sont en adéquation avec les besoins et, dans le cas contraire, aider à une meilleure offre d’accompagnement. De telles informations ne sont pour l’instant pas accessibles dans les systèmes d’information généraliste ou à partir des enquêtes en population générale. Les situations seront repérées dans la liste des enfants enregistrés, qui, à 8 ans, présentent une déficience neurosensorielle sévère. Quarante familles devraient participer à l’étude qui durera deux ans. Une extrapolation nationale pourra être réalisée à partir de la vision sur ces deux territoires.
1 Un registre est un recueil continu et exhaustif de données nominatives intéressant un ou plusieurs événements de santé dans une population géographiquement définie, à des fins de recherche et de santé publique, réalisé par une équipe ayant des compétences appropriées (arrêté du 6 novembre 1995 relatif au Comité national des registres).
Structurer territorialement les expertises et les accompagnements médico-sociaux
Les réflexions qui ont conduit à la rédaction du schéma national d’organisation sociale et médico-sociale pour le handicap rare 2009-2013 ont fait apparaître de fortes disparités dans les ressources disponibles sur notre territoire pour accompagner les personnes. Le schéma vise donc à structurer les expertises et les accompagnements médico-sociaux pour les rendre accessibles aux personnes en alliant technicité et proximité.
Cette structuration territoriale implique la création de relais interrégionaux et le développement d’une offre médico-sociale d’accueil et d’accompagnement à domicile et en établissement.
État des lieux de l’offre disponible en interrégions
Sous le pilotage de la CNSA, l’Association nationale des centres régionaux pour l’enfance et l’adolescence inadaptées (ANCREAI), IPSO FACTO et Alcimed ont dressé courant 2012 un état des lieux des ressources dans six interrégions [7](pdf, 3.8 Mo) : Nord-Ouest, Ouest, Sud-Est, Sud-Méditerranée, Sud-Ouest, Ile-de-France. L’état des lieux confirme l’intérêt d’une organisation capable à la fois de créer du lien entre les acteurs locaux (professionnels des établissements, MDPH, médecins généralistes, etc.), d’augmenter leurs compétences et de faciliter la mobilisation des ressources aux échelons territoriaux de proximité avec l’appui organisé des centres nationaux de ressources. Le même exercice avait été réalisé en 2011 dans l’interrégion Est [8] (pdf, 1.15 Mo).
Les équipes-relais : une nouvelle organisation des acteurs pour accompagner les personnes
Le schéma national, pour répondre le plus justement à l’équilibre entre technicité et proximité, prévoit une organisation intégrée des ressources prenant en compte l’échelon interrégional. Et ce, dans un double objectif :
- rendre les ressources spécialisées disponibles plus accessibles aux personnes et aux professionnels ;
- permettre aux centres nationaux de ressources de développer leurs missions collectives de recherche, de formation, d’information et d’expertise dans le cadre du Groupement national de coopération handicaps rares (GNCHR).
Ce sont les équipes-relais qui contribueront à faire évoluer les organisations en facilitant la subsidiarité dans le recours aux expertises.
En 2009, lors de la publication du schéma national, les modalités de cette structuration n’étaient encore qu’une hypothèse de travail. Depuis, la notion d’intégration, les nombreux travaux réalisés sur le sujet (dont la généralisation des MAIA), le mûrissement des projets des centres nationaux de ressources, la création du GNCHR et le contexte actuel de mobilisation des ressources pour rendre fluide le parcours de vie des personnes confirment l’intérêt d’une organisation intégrée entre centres de ressources - équipes-relais et ressources locales (qu’elles soient sanitaires, médico-sociales, sociales).
Les équipes-relais qui seront identifiées à l’issue d’appels à candidatures lancés par les ARS début 2014 agiront en complément et en relais du GNCHR et des centres nationaux de ressources en vue de mettre en œuvre efficacement leurs différentes fonctions. Elles faciliteront l’accompagnement des personnes parce qu’elles auront une connaissance des ressources locales.
Un quatrième centre national de ressources
Un quatrième centre national de ressources a été autorisé (Bulletin officiel du 15 février 2013 [9] – pdf, 40.03 Ko). Porté par la Fédération d’associations handicaps rares et épilepsie sévère (FARHES), il appuie les équipes sociales et médico-sociales qui repèrent et accompagnent des personnes présentant une combinaison rare de handicaps avec épilepsie sévère. Ce besoin identifié lors de l’élaboration du schéma national a été confirmé par l’étude conduite par Alcimed en 2011 [3](pdf, 627.61 Ko) à la demande de la CNSA.
Financement des dispositifs d’accueil et d’accompagnement des personnes, spécialisés sur les handicaps rares
En 2012, 6,8 millions d’euros ont été délégués aux ARS pour la création de places et solutions dans les dispositifs existants.
En 2014, une deuxième enveloppe de 23,125 millions d’euros est consacrée à ces dispositifs sélectionnés par les ARS à l’issue d’appels à projets ou créés par extension de places.
L’instruction du 22 novembre 2013 [10] (pdf, 478.47 Ko) présente les modalités de déploiement de l’organisation intégrée, définit les conditions de mise en place des équipes-relais et pré-notifie les autorisations d’engagement de ces équipes et de places nouvelles dédiées aux handicaps rares.